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Oc e No - Opus Cornoneterralis Et NOvellae
28 février 2020

L'HISTOIRE MEDIEVALE, partie 3 : les seigneurs et la guerre

L'un des rôles prépondérant des seigneurs est celui de "MILITES" qu'on pourrait comparer aujourd'hui au terme de "militaire". Les seigneurs de Cournon sont élevés dès leur plus jeune âge aux disciplines guerrières. Durant les 4 siècles que couvrent les cartulaires méridionaux, on a quelques témoignages des conflits auxquels ils ont participé et parfois du caractère belliqueux dont ils faisaient preuve.


Pour en savoir un peu plus : l'aristocratie méridionale autour de 1100 de Hélène Débax


OTHON de CORNON


Le premier dont on a le témoignage sur ses faits de guerre est OTHON DE CORNON que l'on a surnommé "le croisé"* dans l'article précédent pour le différencier des autres Othon.

*le croisé parce qu'il s'est engagé dans la première croisade, faut pas chercher plus loin !

Depuis quelques décennies, les accès menant vers la Terre sainte sont fermés par les turcs Seldjoukides et donc, le pape Urbain II (et accessoirement aux suppliques de l'empereur byzantin, Alexis Ier Comnène) lance le 27 novembre 1095 l'appel de Clermont à libérer la Terre sainte. Urbain II est tellement convaincant qu'une première vague de départ est effectuée par des paysans le 12 avril 1096, c'est ce qu'on appelle la Croisade populaire. Partis à plus de 40 000 d'Europe de l'ouest et d'Arménie, ils sont menés par Gautier Sans-Avoir et Pierre l'Hermite. Cette première vague, désorganisée, se fera exterminée (presque jusqu'au dernier) par les turcs près de Nicée (aujourd'hui Iznik en Turquie. Partir la fleur au fusil en espérant une intervention divine, ça marche pas !).

Croisade populaire

Pour en savoir un peu plus sur la Croisade populaire

Lien vers wikipedia

Parallèlement, les Germains partent en croisade. N'ayant pas de plan bien défini, il stationnent en Hongrie et commettent quelques "exactions". Excédés les hongrois les écrasent à Mosonmagyaróvár (en Hongrie). De là, démarre la Croisade des barons le 15 août 1096 et là, ça va moins rigoler pour les forces d'en face. Mais comme on fait pas un cour sur la 1ère Croisade :

Première croisade

Pour en savoir un peu plus sur la première Croisade

Parmis ces croisés se trouve Raymond IV de Toulouse (ou de Saint-Gilles) qui commande l'une des 4 armées, celle des Provençaux (ou des Méridionaux). Raymond IV est un guerrier confirmé (il a participé à la Reconquista) et sous sa bannière se rallie, entre autre, Guilhem V de Montpellier ; ce dernier est à son tour suivi par quelques seigneurs locaux dont : Guillaume Raymond et Raymond Gaucelin (peut-être de Lunel), Pons et Bernard de Montlaur, Guillaume de Fabrègues, Eléazar de Montredon, Pierre Bernard de Montagnac, Guillaume Arnaud, Othon de Cornon, Guillaume Bertrand et Eléazar de Castries**. Ces derniers participeront aux batailles (entre autres) de Nicée (16 mai 1097), Dorylée (près de Eskişehir en Turquie où ils secourent l'armée Nomande en juillet 1097), Antioche (20 octobre 1097), Tripoli (dans l'actuel Liban), Maarat (11 décembre 1098) ... jusqu'à la prise de Jérusalem (15 juillet 1099). Si certains seigneurs restent en place, dès la fin de la prise de Jérusalem, (mission accomplie) Othon retourne dans son fief de Cournonterral comme l'atteste un acte de décembre 1099.

**A noter que parmi ces noms, l'on retrouve Montagnac et Montlaur. Les 2 familles seront co-seigneurs de Cournon à partir du XIIe siècle.

D'après Charles d'Aigrefeuille (donc, à prendre avec des "pincettes", à l'image de sa "muse" : l'évêque Arnaud de Verdale) dans son recueil "Histoire de la ville de Montpellier" Vol. 2, il est dit :

"En 1114. Guillaume de Cornon fils de Guillaume Raymond Gaucelin(a) voulant aller visiter le Saint-Sépulcre, engagea pour subvenir aux frais de son voyage, la quatrième partie du bois d'Aresquiers(b) aux chanoines de Maguelone(c) ; et s'étant avantageusement établi dans la Palestine, il écrivit, de la Ville d'Acre, à Otton de Cornon son cousin(d), de laisser jouir l'église de Maguelone de tout ce qui lui avait engagé, à laquelle il transporte tout le droit qu'il pourrait y avoir. Dans cette même lettre que nous avons, où il invite son cousin à faire le voyage de la Terre Sainte (en lui offrant, quand il y serait, de lui faire part de sa bonne fortune) il fait mention de Guillaume de Montpellier, qu'il appelle son seigneur(e), et de Dalmas de Castries."

Cette fameuse lettre n'ayant été visualisée que par Aigrefeuille, cet acte mérite critique comme suit :

a) Guillaume de Cornon est, en fait, le fils d'Othon de Cornon (le croisé) et non pas celui de Guillaume Raymond Gaucelin (nom "inventé" par Aigrefeuille, celui-ci est une contraction de Guillaume Raymond et Raymond Gaucelin, compagnons d'Othon en croisade).

b) En fait, une hypothèque sur un 8ème de l'exploitation des Aresquiers et des Salzeirets (bois, pèche ...), 8ème partie qui ne sera cédée définitivement à l'évêque de Maguelone qu'en 1140 par le fils de Guillaume, lui même dénommé Guillaume. Entre temps, les Aresquiers et les Salzeirets seront administrés par Pierre de Cornon (autre fils d'Othon le croisé).

c) L'évêque de Maguelone Gautier de Lille. Celui-ci profite de la situation de l'après-croisade pour acquérir les terres limitrophes à Maguelone (voir le cartulaire de Maguelone entre autres pour voir les acquisitions de l'évêché ... il garde la tète froide l'évêque !)

d) Othon de Grémian fils d'autre Othon de Grémian (voir article précédent).

e) Guillaume de Cornon (Terral) n'était pas vassal de Guillaume de Montpellier.

D'après Alexandre Germain (et d'après les archives !), Guillaume n'aurait fait qu'un simple voyage en Terre sainte pour aller visiter le Saint Sépulcre. Guillaume, son fils (cité juste un peu plus haut, petit b) après une vie maritale conventionnelle s'engagera dans l'Ordre du Temple en l'an 1145.


Bien que la croisade soit le seul fait de guerre connu des Cornon, il n'est pas unique, loin de là. Les Cornon sont très souvent cités "milites" à l'image de Rostang et Richard au XIIe siècle, Philippe ou Bérenger (XIIIe siècle) et ce jusqu'au dernier : Guillaume de Cournonterral au XIVe siècle. Durant tout ce temps, les seigneurs sont souvent cités comme étant partis en guerre ... que ce soit pour le Roi de France ou pour d'autres. Le dernier, Guillaume de Cournonterral, décédera entre les ans 1346 et 1348 (à l'age de 42 ou 43 ans). On ne sait pas si c'est de maladie, de vieillesse ou sur un champ de bataille (il s'était engagé à aller combattre pour le roi de France au nord du pays peu avant).

Ajouté à tout cela, les seigneurs de Cournon rendaient une albergue annuelle de 4 chevaliers (formés, équipés et financés par eux même) à l'évêque de Maguelone. L'albergue rendue à l'évêque continuera à lui être octroyée et les seigneurs qui succèdent aux Cornon continueront d'être des "milites".***

*** Répartis suivant les possessions seigneuriales soit : 2 chevaliers pour Cornon, 1 pour Montlaur et 1 pour Montagnac.

Battle_of_crecy_froissartLa bataille de Crécy, chroniques de Froissart


Bon tous ça, c'est bien joli, très chevaleresque mais on va revenir sur le fait que les seigneurs étaient éduqués pour batailler et que de temps à autre, quand c'était trop calme, ils aimaient bien aller mettre des pavés sur la gueule aux voisins et on en a un beau spécimen avec :


PIERRE de CORNON


Pierre a vécu au XIVe siècle, il est le fils d'Othon de Cournonterral (le 5ème, dernier du nom) et frère cadet de Guillaume de Cournonterral. La guerre de cent ans n'a pas encore débuté et le petit Pierre s'ennuie ferme. D'un caractère plutôt pète-sec, Pierre aime bien rendre visite à ses voisins, histoire de leur coller quelques tartes bien placées. Sa devise est "Si vis pacem, para bellum", "Si tu veux la paix, prépare la guerre", mais bon, Pierre s'en fout un peu de la paix. Pour un regard de travers, quelques centimes manquants sur la note et Pierre sort l'artillerie lourde (et ce n'est pas un doux euphémisme) !

Pierre était déjà connu pour avoir mené une opération punitive à Saussan, accompagné de son père Othon et de son frère Guillaume, mais son "coup d'éclat" eu lieu à Poussan :

On ne sait pas exactement comment l'histoire a débuté mais Pierre-Raymond de Poussan a osé marcher sur les godasses de Pierre. On est le 22 juin 1330, depuis hier c'est l'été et Pierre est au coeur d'une enquète menée contre lui. Dans le courant de ce beau mois de juin, Pierre rameute quelques copains (Guillaume Budi, prieur de Saint-Paul-de-Montcalm qui est un peu le frère Tuck de Pierre, Jacob de Mauguio, Raymond Budi, Guillaume de Coffinhac, Rostand Budi, Jean Boeri de Poussan et quelques autres dont l'histoire à perdu le nom) pour aller faire une petite balade champêtre prés de Poussan. Bien sûr quand on rend visite aux voisins, on ne vient pas les mains vides : frondes à billes de plomb, arbalètes, lances, glaives et autres petites choses sympathiques sont de la partie.

Pour s'échauffer, la troupe s'attaque à la manse de Tarnenco. Ils défoncent la porte de la manse pour y pénétrer et défoncent également les portes d'une chapelle où s'était réfugié Pierre-Raymond pour lui coller quelques coups de glaive bien placés afin de le calmer de sa crise d'hystérie. La peur décuplant les forces, Pierre-Raymond se ressaisit rapidement et arrive à s'enfuir dans l'hospice de Poussan. La troupe, ne se laissant pas démonter par ce petit contretemps sort les balistes afin d'arroser copieusement le lieu avec de la bonne grosse pierre de nos garrigues. Le gardien de la porte de Poussan et le vicaire de l'évêque font appel à la force publique et à la garde royale. Ces derniers encerclent la troupe mais comme Pierre et ses copains sont pas encore calmés, ils mettent une rouste à la garde royale. La bave aux lèvres et les yeux encore injectés de sang mais sentant le vent tourner, Pierre et ses potes décident de quitter les lieux et retournent aux chevaux. Pierre Lonassionni, serviteur royal et épiscopal (intervenant après le feu) a beau beugler que ce qu'ils ont fait c'est pas bien et interdit, ils s'en vont "comme des princes". Pierre reste classieux en toutes circonstances !

On ne sait pas quelle sentence a été appliquée suite à cette affaire mais Pierre a enfreint beaucoup de règles dont celle liée à l'utilisation, en temps de paix, d'équipements et d'armes de guerre ; ceux-ci sont listés sur l'acte de l'enquète :

-Pour l'équipement : épaulières, genouillères, cervelières, plastron de plates, targes et grands boucliers.

-Pour les armes : Balistes, arbalètes, lances, piques, glaives, poignards et frondes à pierres plombées.

Baliste

Pour en savoir un peu plus sur les balistes

Lien vers wikipedia

Une dernière arme a été utilisée par la troupe est appelée : mousquet. Attention ce dernier n'est pas le mousquet du XVIe siècle. D'après les infos que nous avons récolté çà et là, le mousquet du XIVe siècle était soit un petit canon portatif, soit une hallebarde équipée d'un canon, soit une mouchette (moschetta, flèche utilisée avec la baliste (plus probable)). Si quelqu'un a d'autres informations là dessus, nous sommes preneurs.


Et les seigneurs d'ailleurs vis-à-vis de Cournon?


A l'image des seigneurs, les Cournonterralais aiment bien en découdre de temps en temps, surtout avec les gens de Pignan. Ces derniers ont parfois été utilisés comme mercenaires par les co-seigneurs de Cournonterral afin de réaffirmer leur autorité sur le "petit peuple". Quand aux assauts "militaires", les gens de Cournon sont plutôt tranquilles et n'ont jamais subit aucun siège ou attaque durant le moyen âge. La seule fois où cela a failli chauffer pour eux c'est à la fin du XIVe siècle suite aux raids des routiers dans la région.

Grandes compagnies

Pour en savoir un peu plus sur les routiers

Lien vers wikipedia

En l'an 1362, les compagnies de routiers sont chassées de Nîmes. On compte parmis leurs principaux chefs : Jean Aimeri, l'anglais Gacie ou Gassiot du Chastel, le Bort ou le Batard de Bretal, Bauducard d'Albret, Espiote Bertuchin, Pierre de Montaut, l'allemand Jean Havezorgues (ou Hazenorgues), Petit Meschin et Arnaud de Taillebort. Sans le sou, quatre de ces compagnies (commandées par (dixit le Thalamus Parvus) Johann Hazenorgues et les Gascons Pèire de Montaut et Espiòta (Ajouté à ceux là un 4ème commandant routier : Alaman)) cantonnent à Mireval, Vic, Lavérune et Pignan. Durant l'été 1362 ils incendient le château de Pignan et le lendemain tous ses faubourgs. Le même jour, une grande partie des faubourgs de Mireval et de Vic sont également incendiés. Après ces exactions, les routiers quittent les lieux et continueront à piller et incendier à travers la région jusqu'à ce que Bertrand du Guesclin y mette un peu d'ordre. On est passé pas loin de la catastrophe ! Vic appartenant aux seigneurs de Cournon, on ne sait pas comment ils ont géré cette crise mais cela à amené, quelques années plus tard, à la construction des fortifications définitives de Cournonterral, cela est une autre histoire ...

 


La suite au prochain épisode !


Un air qui a profondément marqué son époque :

L'homme armé

interprété par Karl Jenkins

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